Algorithme, une nouveauté déjà ancienne

LES 20 MOTS DE L’IA FORMATIVE

Le mot Algorithme vient du mathématicien Al-Khwarizmi, le père de l’algèbre, qui en latin se dit Algoritmi (Abrégé du calcul par la restauration et la comparaison, 813-833).

L’algèbre qu’il appelle « restauration » est la transformation d’une réalité en équation, plus facilement manipulable.

En France, ce mouvement d’abstraction et de mathématisation de la réalité est devenu dominant au 19ième siècle pour en faire au 20ième siècle un outil projectif qui permet la construction et surtout le pilotage des projets.

Le grand mathématicien allemand David Hilbert avait comme devise : « Nous devons savoir, nous saurons » (1930).

L’informatique va donner une nouvelle impulsion à cette notion d’algorithme avec les développements des arbres de décisions et les outils statiques, particulièrement avec les LLM.

La mathématicienne Cathy O’Neil définit l’algorithme comme une simple « recette de cuisine » (Algorithme, la bombe à retardement, 2018).

L’algorithme est une pédagogie.

La pédagogie est le chemin pour atteindre un objectif, construit étape par étape. La rencontre entre la formation et les algorithmes était pédagogiquement programmée.

Mais ce n’est pas sans interrogation.

Il y a, par exemple, ceux qui interrogent la montée en puissance de la raison rationnalisante, en comparaison de la raison sensible.

A trop insister sur l’homme rationalisé, l’homme-machine, on en oublie sa part humaine, sa poésie.

Comment comprendre cette situation ?

Prenons l’exemple du GPS et de son algorithme pour choisir le chemin le plus court, le plus performant pour atteindre l’objectif. La neuroscientifique Eleanor Maguire a montré les conséquences sur le cerveau et l’amnésie numérique qui s’en suit.

La performance détruit une part de la capacité de mémoire de l’homme, transférant à la machine le pilotage des résultats qui sont optimisés par ailleurs. Là où c’est gênant, c’est lorsque la machine se trompe ou tombe en panne et que l’homme à désappris à se guider seul.

Le choix des algorithmes n’est pas neutre.

D’autant, qu’avec la sophistication de plus en plus grande des algorithmes, il y a une inquiétude sociale que l’homme ne soit plus le maître de la machine qu’il a créée.

L’algorithme devient une « boîte noire », sans que l’on chaque comment elle choisit.

Tik Tok a refusé de dévoiler son algorithme pour ne pas perdre son avantage concurrentiel.

Même le mouvement de l’Open data qui ouvre les traitements des données font rarement de l’Open Science en ouvrant aussi ses méthodes de traitement, le data set qui permet de calculer les données.

On peut noter qu’OpenAi était Open science à son début, d’où le nom et que c’est la raison pour laquelle Sam Altman a été renvoyé en novembre 2023.

La société a besoin de construire une pédagogie de l’IA pour assurer le développement de la productivité qu’elle génère, mais aussi de construire l’acceptabilité sociale de l’IA, soir son érotisation sociale.

Et la formation ?

Elle a les algorithmes qu’elle mérite.

Avec l’Organisation Scientifique de la Formation, la formation était centrée sur le contenu validé par l’expert, l’algorithme poussait du contenu, adaptive learning, en fonction de la progression de l’apprenant. La puissance de calcul permettait d’individualisation en masse les parcours apprenants.

Aujourd’hui, avec le décentrage de l’expert vers l’apprenant, l’algorithme propose d’autres « recettes » pour connaître l’apprenant et comprendre ses besoins, voire de les anticiper avec la prédictibilité.

Comme on le voit, l’algorithme est tout à la fois technique, mais d’abord une question de choix pédagogique.

L’algorithme en formation n’est pas une donnée exogène, mais une construction sociale.

La question n’est pas que permet la technique, mais quelles nouvelles formes de la formation voulons-nous construire ?

Fait à Paris, le 26 septembre 2024

@StephaneDIEB pour vos commentaires sur X