Le vibe learning

20 MOTS DE L’IA FORMATIVE, LE PETIT TEMNA EXPLIQUE

L’intelligence artificielle développe de nouveaux comportements d’usage pour l’apprenant. Elle donne naissance à des tendances émergentes, parmi lesquelles le vibe learning se distingue par sa dimension intuitive et fluide.

De quoi s’agit-il ?

Le vibe learning est inspiré du vibe coding, une pratique de développement logiciel assistée par IA, où l’interaction avec la machine devient presque naturelle. L’intelligence artificielle prend en charge les tâches répétitives, propose des suggestions de syntaxe, et peut même générer automatiquement de la documentation. On ne parle plus d’un simple assistant : l’IA devient un partenaire actif dans la création. Cette méthode permet de gagner en rapidité, de réduire la charge cognitive de l’apprenant, et d’améliorer la qualité globale des productions.

Mais ce modèle dépasse le monde du code. Il propose une nouvelle manière d’apprendre par ambiance, par résonance pour reprendre le terme de Rosa Hartmut (Pédagogie de la résonance, 2022), en laissant émerger les contenus selon l’énergie du moment, selon la « vibe ».

Quelles conséquences sur l’apprentissage ?

L’apprenant, pour reprendre la définition freudienne, exerce une attention flottante dans l’infobésité des contenus.

« Il ne faut rien accorder d’une attention particulière, ne pas chercher à fixer son attention sur quelque chose en particulier, mais laisser également suspendue à tout ce qu’on entend. » (Conseils au médecin dans le traitement psychanalytique, 1912)

Maintenir l’attention sur tout ce que dit le patient, sans privilégier consciemment un contenu plutôt qu’un autre. L’apprenant ne lit pas tout. Il scrute, cueille les signaux saillants, capte les intensités qui l’interpellent. Sandra Enlart parlait en de scan apprenant (Faut-il encore apprendre ? avec Oliver Charbonnier, 2010)

Le grand avantage de ce type d’approche, c’est qu’il permet de brasser une grande quantité d’informations sans alourdir la charge mentale.

Ce nouveau rapport au savoir rejoint la notion de sérendipité connective développée par Pek van Andel (Anatomy of the unsougnt finding, serendipity, 1994) : l’art de découvrir l’inattendu, par vagabondage intellectuel.

L’IA comme générateur de vibes pédagogiques

L’intelligence artificielle construit un apprentissage d’atmosphère. En personnalisant les contenus, en les synthétisant, en adaptant le ton, le rythme, le format, elle permet à l’apprenant de se sentir en phase avec ce qu’il explore. Elle organise les flux de savoirs selon une logique d’harmonie cognitive.

L’IA favorise ainsi une errance fertile, tisse des apprentissages à travers des associations d’idées imprévues. Elle devient un capteur de synchronicités cognitives, en proposant -souvent sans y être invitée explicitement – des prolongements inattendus. Elle anticipe le mouvement intérieur de la pensée.

C’est une démarche rhizomatique, chère à Gilles Deleuze et Félix Guattari : le savoir n’est plus pyramidal, vertical, mais horizontal, diffus, multidirectionnel. L’apprenant évolue dans un milieu informationnel fluide, qu’il peut remodeler selon ses curiosités, ses émotions, ses besoins.

Une poétique du savoir augmenté

Ce rapport renouvelé au savoir permet de développer ce que Gaston Bachelard appelait une poétique de la connaissance. L’IA, bien utilisée, devient technopoétique : elle accompagne une rêverie structurée, un voyage dans le sensible. L’apprenant ressent le savoir avant même de l’intégrer cognitivement.

Apprendre, ce n’est plus absorber des données, mais vibrer avec ce qui est appris.

La vibration devient un indicateur d’engagement.

Le vibe learning se présente ainsi comme une réponse contemporaine à l’infobésité et à l’épuisement attentionnel, dénoncé par Yves Citton. Il libère du stress de la complétude et favorise l’engagement apprenant intellectuel mais aussi sensoriel, émotionnel.

La co-production des apprentissages crée une posture inédite de par son externalisation partielle.

L’intelligence artificielle ne remplace pas l’apprenant : elle l’augmente renouant en cela avec les pédagogues sensualiste du 18ième siècle élargissant la définition de l’apprenant. Elle l’aide à naviguer, à vibrer, à s’étonner, et peut-être, à redevenir curieux.

Fait à Paris, le 02 avril 2025

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