La « destruction créatrice » de Joseph Schumpeter a déjà commencé… au moins dans l’annonce des destructions d’emplois.

Tous les prophètes de malheur ont commencé leur concert des annonces.

Le grand remplacement par l’IA a commencé.

Arvind Krishna, CEO d’IBM a annoncé (CNBC, 11 janvier 2024), l’IA générative va se traduire par la destruction « facilement » de 30 % des emplois qui ne sont pas en contact direct avec les clients d’ici à 5 ans. Cela représente 7 800 emplois remplacés par l’IA.

La banque Goldmann Sachs propose dans une note d’analyse publiée le 26 mars 2023 (https://www.key4biz.it/wp-content/uploads/2023/03/Global-Economics-Analyst_-The-Potentially-Large-Effects-of-Artificial-Intelligence-on-Economic-Growth-Briggs_Kodnani.pdf) jusqu’à 300 millions d’emplois qui seront automatisés.

Le cabinet Mckinsey (2017) enchaîne le pas, il prévoit entre 400 à 800 millions d’emplois d’ici à 2030.

La polarisation se fait entre les technophiles et les technophobes.

Cela peut être perçu comme une éthique de la discussion (Habermas, 1992), un débat qui entre dans le social, avec l’idée encore dominante que la marche du progrès est inéluctable. Les luddites de l’IA n’empêcheront pas le progrès technique.

Des métiers disparaissent. Ce sont les fameux 20 000 porteurs d’eau de Paris en 1 608 qui disparaissent aux profils des fontaines collectives, les poinçonneurs du métro parisien qui disparaissent avec les années 60.

La technique progresse, et le temps ne fait rien à l’affaire.

Et pourtant, la finesse d’analyse est ailleurs.

Une étude de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) sur l’IA du 21 août 2023 (https://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/—dgreports/—inst/documents/publication/wcms_890761.pdf) propose un angle original.

Le risque d’automatisation ne touche que 5,5 % des emplois dans les pays à revenu élevé. Le « Big Bang » est modeste. Il faut dire aussi que l’OIT n’est pas un prestataire de service qui se propose d’adapter les entreprises aux changements liés à l’IA, le regard des métriques peut être différent.

Et surtout, cette étude raisonne à partir des activités et non des métiers.

Cette subdivision est riche en opérationnalité.

Les taches de bureau sont, par exemple, « fortement exposées » à hauteur de 24 % et « moyennement exposées » à hauteur de 58 %. ChatGPT va changer les règles du jeu à hauteur de 82 %.

Les activités changent, mais sans forcément toucher aux métiers, comme agrégateur d’activité.

L’identité métier, ce qui fait que chacun se sent identique à ses pairs, reste alors que l’activité change. « Tout change pour que rien ne change » (Le guépard, Luchino Visconti, 1963).

L’IA Générative va augmenter la productivité de certaines activités. Par exemple, PwC propose depuis 2023, comme d’autres, un agent conversationnel juridique, assis sur Open AI, pour accompagner ses 4 000 juristes. Mais l’avocat restera toujours un avocat.

L’activité change, mais pas le métier.

C’est tout le cœur de la politique de transformation des collaborateurs.

Existe-t-il une possibilité de transformation heureuse ?

En reprenant la démarche de l’OIT, partir des activités, et permettre aux métiers d’évoluer par ces activités. Comment ?

Avec deux démarches complémentaires, l’acculturation, faire de l’IA une réalité sociale, et l’Age du faire, faire de l’IA un réel social. C’est le travail de formation qui doit mettre en œuvre une pédagogie de l’IA pour en faire un usage, une pratique.

Faire des emplois augmentés pour à terme augmenter la productivité des emplois.

Pour pasticher une formule célèbre : « La formation, c’est maintenant ».

Fait à Paris, le 11 avril 2024

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